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La création de l’atelier du Moulin du Prieur

En 1850, le chandail marin, qui allait faire le succès et la renommée de la marque Saint James, n’existait pas encore. Léon Legallais, maire de la commune de Saint-James (Manche), ville éponyme de la future marque, fonde une filature appelée « Moulin du Prieur ».

L’entreprise familiale tisse et teint la laine locale. Elle est produite par les moutons dits de « prés salés » élevés sur les rives du Couesnon, dans la baie du célèbre Mont Saint-Michel, situé à quelques encablures de Saint-James. Cette laine de qualité est revendue aux merceries et aux magasins de bonneterie de la région, qui commercialisent alors des bonnets, des chaussettes et divers articles d’habillement en maille.

Sans le savoir, Léon Legallais construit les fondations d’une marque qui traversera les décennies, devenant un emblème de la mode française et l’héritière d’un savoir-faire ancestral.

La naissance des filatures Saint James et du chandail marin

Quelques années plus tard, en 1889, l’atelier du Moulin du Prieur devient officiellement la société anonyme des Filatures de Saint-James.

Léon Legallais continue à y fabriquer des pelotes et des écheveaux revendus aux merceries de Normandie et de Bretagne. Il décide également d’innover, et se lance dans la commercialisation du tout premier vêtement Saint James : le chandail marin.

Tricoté en maille serrée avec la laine des moutons de prés-salés, résistant et chaud, il doit son nom à l’activité des pêcheurs bretons et normands. Ces derniers avaient en effet l’habitude, entre deux saisons de pêche en Atlantique Nord, de traverser la Manche pour partir vendre de l’ail sur la côte sud de l’Angleterre.

 

À l’époque, le chandail marin fait partie du paquetage du matelot : il habille les Terre-Neuvas, ces marins qui partaient pêcher la morue dans l’Atlantique Nord, au large du Canada, sur les bancs de l’île de Terre-Neuve.

Ils annonçaient leur présence en criant : « Marchand d’ail ! Marchand d’ail ! », et les Britanniques entendaient « … chand’ail, chand’ail ! ». C’est ainsi qu’est né le nom du vêtement emblématique de Saint James qui, au siècle suivant, séduira les Français et les plus grands créateurs de mode.

Ces pêcheurs affrontaient pendant 6 ou 7 mois des conditions extrêmes, bravant la météo peu clémente, la mer agitée et la dureté du travail. Le chandail devait les protéger le mieux possible du froid, sans entraver leurs mouvements pour ne pas compliquer les manœuvres sur les bateaux.

Les années 1950 à 1970, un nouveau tournant pour Saint James

Faisons un petit bond dans le temps : nous voici désormais en 1950, dans la France de l’après-guerre. Les filatures Saint James sont reprises par Julien Bonte, qui décide de moderniser l’entreprise et de recentrer les activités.

La vente de pelotes de laine et d’écheveaux appartient au passé. Désormais, Saint James se concentre sur la fabrication du « Vrai Chandail Marin », un nom déposé par la marque, qui est alors propulsée au rang de « leader français de la maille marine ».

Les congés payés, instaurés en 1936 pour une durée de deux semaines par an, sont allongés : les Français peuvent désormais partir en vacances pendant trois semaines, grâce à la loi du 28 février 1956, votée sous le gouvernement Guy Mollet.

L’allongement et la généralisation des congés payés incitent les Français à partir, de plus en plus nombreux, passer l’été au bord de la mer. Cette tendance se confirme dans les années 1970, suite au vote de la quatrième semaine de congés payés et au vent de liberté soufflant après mai 1968.

De la Manche à l’Atlantique, en passant par la Méditerranée, la navigation de plaisance séduit de plus en plus de vacanciers, qui adoptent avec enthousiasme le style marin. En 1972, Bernard Bonte succède à son père Julien Bonte à la tête de l’entreprise, renommée Les Tricots Saint James en 1970.

Bernard Bonte contribue à démocratiser le vêtement marin, et crée des collections saisonnières pour séduire les Français en vacances. Jusqu’ici exclusivement en maille, les vêtements Saint James sont dès lors également tissés, et de nouveaux modèles voient le jour, comme les chemises et les pantalons.

En 1976, l’entreprise, toujours implantée dans la commune de Saint James, s’agrandit et acquiert de nouveaux bureaux et de nouveaux ateliers. Dès 1980, la marque s’exporte à Tokyo puis dans le monde entier, bénéficiant d’une aura à l’international.

En 1990, pour préserver l’avenir de l’entreprise et conserver les emplois en France, comme le souhaitait Bernard Bonte, l’entreprise est rachetée par ses salariés. Une Reprise d’Entreprise par les Salariés (RES) est effectuée, et le directoire de la société est dès lors présidé par Yannick Duval.

L’entreprise se réorganise, valorisant encore plus le travail en équipe grâce à la création de groupes autonomes permettant aux salariés de changer régulièrement de poste. Saint James se développe et gagne des parts de marché, tout en poursuivant son essor à l’international.

De nouvelles collections de chemises, de pantalons et de vestes voient le jour, adoptant un style marin « casual chic » que la marque illustre encore parfaitement aujourd’hui. Les équipes s’installent dans de nouveaux locaux en 1996, avant une nouvelle extension 5 ans plus tard, pour une logistique adaptée à la croissance de la marque. En 2001, l’usine et les bureaux s’étendent sur 11 000 m2.

En 2013, Luc Lesénécal, ancien directeur général adjoint de la coopérative laitière Isigny Sainte-Mère, prend la tête de l’entreprise, secondé par Patrice Guinebault, ancien adjoint au directeur financier de Saint James. Les vêtements de la marque séduisent les créateurs et la marinière devient une pièce emblématique de la mode française.

Aujourd’hui, Saint James compte plus de 300 collaborateurs et un réseau d’une soixantaine de magasins, dont une trentaine lui appartenant en propre. 5 nouveaux magasins sont créés chaque année, illustrant le succès jamais démenti d’une marque à l’identité forte et au savoir-faire ancestral.

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